Tous les jours, je scrute les sites de réservation en ligne, et tous les jours mon espoir est déçu, toujours pas de vol pour l’Egypte.
Positive par nature, je refuse de désespérer, il finira bien par arriver ce jour béni, où je te retrouverai Masr, mais mon Dieu que cette épreuve nous aura tous marqués.
Ce virus de malheur nous a privés de tout ce qui faisait notre vie, et même de tendresse, ces fameux gestes barrière qui sont devenus notre quotidien depuis 4 mois et qui mettent tant de distance entre nous et ceux que nous aimons.
Bien sûr depuis quelques semaines on se revoit, mais toujours avec cette terrible distanciation, on se sent seul, isolé, ne pas pouvoir prendre les nôtres dans nos bras, les embrasser, est une lourde contribution, mais notre salut est àce prix, paraît-il.
Et parallèlement à notre sacrifice, nous assistons à un déferlement de rassemblements, ce besoin de retrouver une vie normale est compréhensible, mais ôcombien dangereux.
Porter un masque est une contrainte, personne ne dira le contraire, surtout avec la chaleur estivale, mais dans cette période troublée ne faut-il pas que le moi s’efface devant le nous ?
Toutes ces manifestations, sauvages pour la plupart, ont hélas portédes fruits, et la Covid 19 a profitéde l’aubaine, de nouveaux foyers épidémiques ont surgi ça et là, et les chiffres après une baisse significative, repartent àla hausse.
On en sortira quand ?
Ce n’est pas comme ça que les vols reprendront, et pourtant je rêve de retrouver mon tapis magique, de me poser enfin à Cairo-Airport, je me vois déjà dans le taxi qui me fera traverser le Caire, je verserai quelques larmes de bonheur, non seulement parce que l’Egypte m’aura beaucoup manquée, mais aussi parce que l’épreuve aura laissé des séquelles, et que sourire, vivre, aimer, semblent appartenir àune autre vie.
Mais au fond de moi je sais que je me laisserai à nouveau séduire par ma deuxième patrie, je me pencherai sur le Nil qui me parlera, il me redira ces mots dont nous avons le secret, lui et moi.
L’Egypte est un don du Nil, il en est le père spirituel, tout ce qui pousse, vit sur la terre des pharaons est le fruit du fleuve sacré, son eau majestueuse serpente du Nord au Sud, et apporte ses bienfaits à tous les Egyptiens.
Je vous parle souvent des fruits et légumes au goût incomparable, s’ils sont inimitables c’est bien sûr grâce à la générosité de Râ, mais c’est aussi parce que les cultures sont irriguées par le fleuve ancestral.
Je me souviens la toute première fois où j’ai traversé le désert, quelle ne fût pas ma surprise de voir le décor sablonneux s’effacer devant des plantations d’un vert tendre, ignorant les chauds rayons du soleil, ce jour là j’ai compris l’importance du Nil, il est et restera égyptien, là où il a creuséson lit depuis la nuit des temps.
Tandis que j’écris ces mots, un petit crachin breton dessine des petites perles sur ma vitre, alors je pense, je rêve, mon taxi vient d’emprunter le pont Ramsès ...j’arrive, je suis là Masr...attends moi !
Insha Allah
Ana masria, Tahya Masr !