Le rêve révélateur

Dimanche 27 Janvier 2019-00:00:00
' Wolf Starke

Hormis le fait que les saisons se mettent au diapason d'une façon nonchalante, tout comme le printemps qui se laisse désirer, le sentiment que le monde tourne de plus en plus vite nous donne le vertige! Il en résulte des perturbations du sommeil, limite des délires paranoïaques qui nous poursuivent... 

Dans mon rêve, des oiseaux de contes de fées rutilant, tournoient dans le ciel, et “l'oiseau de feu“ encore en liberté, dansant audacieusement et effrontément dans les hauteurs, semble être le messager de mauvaises augures! La musique homonyme d'Igor Stravinsky transmet une impulsivité qui semble libérer ce caractère dramatique et cette énergie sauvage comme un sismographe... et nous enchante! Cette œuvre moderne est un ballet en deux tableaux créés pour une première performance à l'Opéra de Paris en 1910... Elle se base sur un ancien conte russe dans lequel le légendaire “oiseau de feu” tout d’abord capturé, retrouve par la suite sa liberté tant désirée.

Dans l'horoscope chinois, l'année 2017 était placée sous le signe du “coq de feu“, prestigieux oiseau flamboyant stylisé par son magnifique plumage rouge et d’or. Oiseau rebelle et excentrique, féru de morale, de vérité et de justice, ce n'est point un diplomate…

Cette tempête passée... le coq de feu qui avait émergé comme Phénix de ses cendres ... s’effondra avant l’arrivée de l'année du “chien de terre” (période dite positive dans tous les domaines)... une aube nouvelle a ensorcelé nos sens et nous a fait ressentir selon toute vraisemblance qu'un meilleur monde s'offrait à nous... et malgré un profond scepticisme, nous l'avions accueilli à bras ouverts. 

Le mythe du Phénix, oiseau fabuleux issu du culte du héron cendré est vénéré par les Anciens Égyptiens. Sous la gloire de son immortalité, le héron est pour eux le garant indéniable du continuel retour de la crue du Nil! À Héliopolis -en grec, ville du soleil- le héron serait une incarnation de Rã, dieu du soleil, sous le nom de Bennou! Le coq de feu est aussi l’attribut d’Hélios et d’Apollon, au caractère fougueux et combatif, et de Minerve, déesse de la stratégie guerrière. En héraldique, cet oiseau de légendes est montré de profil, les ailes déployées, posé sur un bûcher d'où se manifeste sa résurrection et son immortalité!

Le Phénix est souvent comparé à une variété de coqs domestiques du Japon, le Shokoku ou l’Onagadori, dont les plumes de leur panache s‘accroissent démesurément reflétant diverses couleurs lumineuses.

Le Nouvel An lunaire, appelé aussi fête du printemps, festival d'une grande importance pour tout le monde asiatique, s'ouvre en 2019 sur l'année du “cochon de terre” selon le calendrier chinois.

Au Japon, il est plutôt question du continuel retour de la floraison des cerisiers, “Sakura”, symbole de la beauté et fragilité de l'existence! Les campagnes et villes sont recouvertes d'un flamboyant manteau blanc rosé… Tout comme sur une grande partie du pays, Kyoto l’impériale… l’ancienne Heian-kyō, [capitale de la paix et de la tranquillité] s'apprête à célébrer le “Hanami”, phénomène attendu avec impatience. Satisfaisant cette ancienne tradition, les Japonais déambulent sur les tapis blancs et rosés jonchés de pétales de fleurs, symbole de la beauté éphémère et métaphore de la vie lumineuse. Des rassemblements pour partager l'émotion, méditer, chanter et réciter des poèmes...! Ce peuple connu pour sa réserve légendaire se retrouve regroupé et allié dans une harmonie solennelle afin de partager les traditions spirituelles en interaction avec la nature. La couleur blanche, synonyme du deuil, laisse place aux considérations contemplatives de la fugacité de vie dans le contexte personnel ou général. 

Quasi un remède sophistiqué contre solitude et peurs dans nos temps mouvementés, souvent touchés par l'hystérie quotidienne et tout ce matraquage des médias et publicités.

On comprend donc mieux le véritable sens du mot “Zen”, profondément ancré dans la pensée japonaise. Nonobstant la dominance d'un équilibre esthétique dans les jardins japonais, définit par le traité de 1289 sous l'ère Heian, ils sont aussi une expression de la pensée philosophique et religieuse, bien traduit dans les jardins secs -karesansui- des temples zen, célébrant l'abstraction et refusant le superflu. Le temple Ryôanji de Kyoto en est le modèle parfait conjuguant la sensibilité et la méditation… 

La philosophie bouddhique zen avec son rayonnement dans la vie quotidienne, constitue non seulement un pouvoir d'ordre mais en particulier une force psychique qui ne devrait pas être sous-estimée. Rien qu'à y penser, ce serait sûrement bien un remède utile contre la surestimation de soi si répandue de nos jours, peut-être aussi pour faire réfléchir et calmer des êtres surexcités et déséquilibrés! 

Dans notre philosophie occidentale, la recherche du soi est fondamentale, tel l’oracle de Delphes “connais-toi toi-même“ -gnothi seauton- inscrit sur le fronton du temple d'Apollon à Delphes où la prophétesse Pythie rendait ses oracles. Socrate reprend cette idée, à plusieurs reprises, dans les fameux dialogues tels Charmide, Philèbe etc..

Cet oracle est en effet au cœur de sa pensée ainsi que pour son disciple Platon qui a mis ces dialogues philosophiques en scène. En conclusion, il se dit que la vérité de l'univers se trouve à l'intérieur de l'homme, lui seul ayant une conscience. L'homme est donc capable de chercher et trouver les réponses aux mystères du monde! Pour Dante Alighieri dans ”La Divine Comédie” le bonheur se cristallise dans ce moment où la vérité est enfin révélée à notre conscience, ce moment où notre esprit réalise le fait d’avoir vécu jusque-là dans l’erreur !

Prenant cette base de pensées très proches de la zénitude bouddhiste, les philosophies occidentales prônent une attitude plutôt stoïque aussi basée sur les conclusions de Platon que le principal but dans la vie est de réussir “la maîtrise de soi” … la bataille la plus difficile, mais aussi la plus glorieuse ! En effet, face aux périls extérieurs, l'âme est unie, mais divisée lorsqu’elle se retrouve en conflit avec elle-même… et je dirais restons Zen alors et trouvons nos réponses adéquates et responsables en toute humilité humaine et laissons une chance à la veritas !