Après l’incendie du Musée de Rio, le 2 septembre, une question se pose : quel avenir pour la recherche dans les musées ? C’est avec sidération que nous avons regardé les images du Musée national de Rio en flammes, puis celles des murs calcinés du palais où avait disparu la quasi-totalité de la plus grande collection d’histoire naturelle de l’Amérique du Sud. Eduardo Viveiros de Vastro, anthropologue mondialement connu dont la carrière s’est entièrement déroulée dans le Musée national, a décrit ces ruines comme un « Ground Zero » dans lequel se réfléchissent les autres désastres qui affectent la nation brésilienne.
La destruction du lieu, même si elle est due à un incendie accidentel, a en effet une signification politique et écologique : c’est une partie de la mémoire de la diversité du Brésil qui s’est volatilisée, avec ses langues documentées dans la bibliothèque, ses objets fabriqués par les populations autochtones, ses spécimens d’espèces animales et végétales aujourd’hui disparues. Au-delà de l’émotion causée par cette perte inestimable, que penser des images de cette catastrophe ?
Commençons par détourner légèrement la focale. En se déplaçant du quartier pauvre et désaffecté de Sao Cristovao qui entoure le Musée national de Rio vers la zone portuaire en cours de rénovation, on découvre un musée entièrement nouveau, le Musée de demain. Dilma Rousseff a inauguré en 2015 ce bâtiment ambitieux et coûteux, alors qu’aucun président du Brésil ne s’est rendu au Musée national depuis 1960. Les visiteurs se pressent pour y voir des expositions numériques sur l’avenir de la planète, mais aucune collection n’y est conservée. Par contraste, faudra-t-il appeler le Musée national, que le gouvernement brésilien a promis de reconstruire, le « musée du passé » ?
Le bâtiment qui abritait le Musée national était en effet le palais dans lequel vivait l’empereur du Brésil au XIXe siècle.