Le sohour du Calife Fatimide

Jeudi 31 Mai 2018-00:00:00
' Magdi Chaker

Le Calife était assis près de la fenêtre avec en dessous les réciteurs du Coran pour qu’il les voie. Ensuite arrivaient les muezzins qui disaient Allah Akbar, rappelaient les vertus du sohour et clôturaient par des prières. Ils mentionnaient alors les vertus du mois et faisaient la louange du Calife, jusqu’à l’écoulement de plus de la moitié de la nuit et à l'approche du sohour, on apportait des qatayefs (galettes) et tous les mangeraient, le reste était donné aux plantons.

Le Calife était assis dans un endroit connu sous le nom de sodla (qui est fermé de trois côtés et ouvert du quatrième côté, où il y avait la fenêtre située à peu près au centre du palais), au même endroit où il prenait le petit-déjeuner, et devant se trouvait la table remplie de tous les types de viande, au milieu un grand chapeau rempli de nourriture. Le Calife ordonnait aux plantons de distribuer du contenu du grand chapeau à tous ceux qui étaient présents. Chacun qui se servait devait se lever et embrasser la terre afin de prendre la bénédiction à ses enfants et sa famille. On présentait ensuite des plats en porcelaine remplis de qatayefs.

 

Le messaharati comme patrimoine devant être exploité dans le tourisme

Qui parmi nous n'a pas grandi et entendu la voix du chanteur Sayed Mekkawy chantant les poèmes de Fouad Haddad au programme général de la Radio, disant: «Réveille-toi l’endormi, prie l’Eternel, Ramadan Karim?». Quelles sont les origines de cette tradition?

A la lumière des technologies modernes et les veillées jusqu'à l'aube, la carrière de messaharati est progressivement en voie de disparaître, étant basée sur quelques garçons dans les quartiers populaires du Caire, des villages et des villes du Delta et de la Haute-Egypte. Nous demandons de maintenir cette profession et de développer le tourisme culturel, son exploitation et son classement comme patrimoine populaire avec ses poésies et ses chansons spécifiques à travers les âges et la célébration associée au messaharati avec les enfants portant des lanternes. Il faudrait faire la lumière sur cet événement via les médias et l’inclure dans le tourisme, ainsi qu’à travers le théâtre et le cinéma et l’afficher pendant le Ramadan et tout au long des mois de l'année dans les palais de la culture, les sites d'Al-Hussein et les monuments islamiques comme aspect d'un ancien patrimoine.

Les Musulmans, depuis l'époque du Prophète Mohammad, paix soit sur Lui, définissaient le moment du sohour comme étant l’appel du muezzin Bilal et connaissaient le moment d'interdiction de manger comme étant l’appel du muezzin Ibn Oum Maktoum. Il y avait deux appels à la prière, un à l'aube réalisé par Bilal et était à l'avance de l’heure prévue, et l’autre effectué par Abdallah ben Oum Maktoum. Il est écrit dans le hadith rapporté par Boukhari et Muslim: «Bilal appelle à la prière la nuit, mangez et buvez jusqu'à ce qu’Ibn Oum Maktoum fasse l’appel». Les gens de la ville n’avaient pas besoin d'être plus alertes sur le sohour selon une étude archéologique sur le messaharati et les éléments de Ramadan.

Avec l'expansion de l'Etat islamique et la multiplicité des Etats ont commencé d'autres moyens d’avertir du sohour. Les Musulmans s’ingéniaient dans les moyens et les méthodes jusqu’à l’émergence de la fonction du messaharati dans la période abbasside. Ben Yaqaza était le messaharati du Calife.

Le wali d'Egypte, Ataba Ibn Isaac, est considéré comme le premier à avoir effectué la tournée dans les rues du Caire la nuit du mois de Ramadan pour réveiller ses habitants pour le sohour en 238 de l’Hégire/853.Il supportait la marche de la cité de l'armée à Fostat pour appeler les gens en disant: «Adorateurs de Dieu dans le sohour il y a la bénédiction». Le messaharati, à l'époque abbaside, tenait un petit tambour sur lequel il tapait en utilisant un morceau de cuir ou de bois accompagné d’un garçon ou d’une petite fille avec une bougie ou une lampe pour éclairer son chemin. Les femmes laissaient à la porte de leur maison des pièces de monnaie enveloppées à l'intérieur du papier, puis en allumaient l'une des parties. Le messaharati pouvait alors repérer le lieu de la lumière du feu, appelait les propriétaires de la maison et leur récitait la Fatiha.

A la fin du mois sacré, il passait par les maisons qui comptaient sur lui au sohour pour prendre son salaire soit en pièces de monnaie ou du pain ou de l'argent.

La carrière du messaharati ne se limite pas aux hommes seulement, comme certains le croient. Comme il y a le messaharati, il y a aussi la «messaharatiya». A l’époque toulounide, la femme chantait des chansons de derrière la fenêtre au moment du sohour pour réveiller les habitants des maisons voisines. Il y avait aussi des femmes éveillées au moment du sohour qui appelaient leurs voisins. La première femme à exercer cette profession fut Set Ehsan qui a hérité le métier de son mari.

A l'époque fatimide, Al-Hakim Biamr Allah ordonna que les gens se couchent tôt après la prière du soir et les soldats du pouvoir passaient par les maisons, frappaient aux portes pour réveiller les endormis pour le repas du matin et avec le temps le gouverneur a nommé un homme pour faire le travail de messaharati. Il appelait alors: «Peuple de Dieu: Lève-toi manger le sohour». Il frappait aux portes des maisons avec un bâton qu'il portait dans sa main qui s’est développé ultérieurement pour battre des battements de tambour régulièrement.

La profession de messaharati a failli disparaître complètement à l'époque mamelouke si ce ne fut Al-Zaher Baybars qui l'a revivifiée quand il a nommé des gens du peuple et des jeunes religieux pour mener à bien cette tâche. On massait alors derrière eux des jeunes enfants avec des lanternes et des bougies. Le tambour du messaharati était appelé «Bazas» comme il était tenu par la main gauche et la main droite tapait avec un morceau de peau ou une tige d’arbre pendant le Ramadan au moment du sohour.

Le Bazas est un tambour du genre d’instrument à percussion avec une face de peau épinglée et son dos est en cuivre creux et a une place qui peut être accrochée. On peut l'appeler tambour du messaharati et le grand volume de ce genre est appelé tambour des chameaux.

Le messaharati répétait quelques phrases à un rythme harmonieux et mélodieux et arpentait les rues et les ruelles avec sa petite lanterne et son tambour traditionnel tapant à un rythme monotone à la porte de chaque maison appelant le propriétaire de la maison en son nom pour se réveiller pour le sohour et la louange à l’Eternel.

«Le sohour jeûneur »…