Bloqué depuis mardi en travers du Canal reliant la mer Rouge à la Méditerranée, l'«Ever Given» a été remis à flot lundi. Le trafic a donc repris dans le Canal, l'une des voies maritimes les plus empruntées pour le commerce international. Après beaucoup de difficultés, les manœuvres ont finalement abouti : les difficultés de renflouagetenaient surtout à la nature rocheuse des berges sur lesquelles s'est échoué le géant porte-conteneurs. Quelque 27.000 m3 de sable ont été dégagés, à 18 mètres de profondeur, pour libérer le navire battant pavillon panaméen.
Impacts sur l’économie mondiale
Après une semaine d'interruption, les dégâts seront considérables. Même si l'Autorité du Canal espère quasiment doubler, à près de 90 cargos par jour, le nombre de navires franchissant le passage. Cela est dû sans doute au fait que le Canal passe environ 10 % du commerce maritime international.
L'assureur Allianz a à cet égard estimé que chaque jour d'immobilisation pourrait coûter entre 6 et 10 milliards de dollars au commerce mondial. Après ces journées de paralysie, la Syrie a commencé à rationner les carburants, par manque de pétrole. Et onze cargos partis de Roumanie, transportant 130.000 moutons vivants, sont aussi affectés, selon les Echos.
« Il faudra maintenant au moins deux à trois semaines pour rattraper les déséquilibres des flux maritimes, car les bateaux en retard venant de Chine seront également en retard pour le rechargement en Europe vers l'Asie », explique le dirigeant d'un groupe logistique. La valeur totale des biens bloqués ou devant emprunter une autre route diffère selon les estimations, oscillant entre 3 et 9,6 milliards de dollars. Les cours du pétrole ont également connu de brusques hausses depuis le début de l'incident, avant de se détendre à l'annonce de la « libération » du navire.
Du thé, des meubles Ikea, des lames de parquet, mais aussi 130.000 moutons … au total, quelque 425 navires et leur cargaison sont bloqués aux extrémités ou dans les zones d'attente du Canal de Suez.
Qui va payer les coûts faramineux pour l’Egypte ?
Les autorités du canal ont de leur côté indiqué que l'Égypte perd entre 12 millions et 14 millions de dollars par jour de fermeture, rapporte korii.slate.fr.
Qui va payer alors ces coûts faramineux? «Des milliers de polices d'assurance ont pu être souscrites et chacun va essayer de se renvoyer la balle», écrit Bloomberg.
«Les propriétaires des marchandises à bord du navire et des autres navires coincés dans le Canal vont probablement invoquer la responsabilité civile du navire pour les pertes des denrées périssables ou des délais de livraison non respectés», avertissent des sources, sous couvert d'anonymat. Il pourrait également y avoir des réclamations pour dommages au Canal. En première ligne figure naturellement le propriétaire du navire, la société japonaise Shoei Kisen KK, qui va certainement se voir réclamer des indemnités de la part de l'Autorité du Canal de Suez.
Un porte-conteneurs de cette taille est probablement assuré à hauteur de 100 à 140 millions de dollars contre les dommages, selon des sources d'assurance citées par Reuters. L'assureur devrait également prendre en charge le coût de l'opération de déblocage. Le UK P&I Club a confirmé à Reuters qu'il était l'assureur de l'Ever Given concernant les réclamations pour pollution et blessures. Mais les autres coûts seront probablement réassurés dans le cadre d'un programme géré par les clubs P&I (des associations d'assureurs qui couvrent mutuellement leurs risques de responsabilité civile), selon David Smith, du courtier d'assurance McGill and Partners.
Et si «Ever Given » avait bloqué le port de Vannes ou de Lorient ?
Un site internet propose de placer le bateau échoué dans le Canal de Suez, en Égypte, n’importe où dans le monde. Nous nous sommes amusés à imaginer le porte-conteneurs dans le port de Vannes, de Lorient, ou à l’entrée de la presqu’île de Quiberon (Morbihan), rapporte Ouest France. Grâce à un nouveau site internet, il est possible de placer n’importe où dans le monde l’Ever Given. Certains internautes se sont amusés à le placer dans des endroits improbables et notamment dans le port des Sables-d’Olonne, « un bon moyen de se rendre compte de l’échelle de ces navires », explique notamment Matthieu Boisdron, docteur en Histoire, sur son compte twitter.
Grâce à l’appli, nous avons placé le porte-conteneurs à côté de la presqu’île de Quiberon. Cela poserait quelques soucis si le bateau s’engageait dans la rivière d’Etel. Les plaisanciers n’auraient plus accès au golfe du Morbihan si le bateau prenait le passage entre Séné et Arradon.
Existe-t-il une alternative au Canal de Suez ?
Plusieurs centaines de navires sont actuellement bloqués. Certains ont fait demi-tour et espèrent rejoindre l’Europe en contournant l’Afrique via le cap de Bonne-Espérance. Ce détour représente près de 6 500 kilomètres et se fait entre cinq à neuf jours de mer selon la vitesse du navire, selon Ouest France. Cela va entraîner un retard dans la chaîne logistique et les prix pourraient flamber dans certains domaines. Mais, il existe une autre alternative. Il s’agit de la route maritime du Nord (RMN) qui permet de relier l’océan Atlantique à l’océan Pacifique en longeant la côte nord de la Russie. C’est le chemin le plus court pour relier l’Europe à l’Asie sans emprunter le Canal de Suez, via le détroit de Béring. Un trajet qui se fait pour l’essentiel dans les mers arctiques. Le navigateur cosaque Simon Dejnev, a franchi pour la première fois le détroit de Béring en 1648. Seul hic, il n’est navigable qu’en été.